Entretien avec Laurent Fellon, l’homme derrière Johann Zarco et Louis Rossi
Laurent Fellon est l’homme derrière Johann Zarco et plus récemment derrière Louis Rossi, deux pilotes français qui animent régulièrement les courses du championnat du monde Moto2 et Moto3.
Entraineur, manager, nous l’avons rencontré afin de mieux connaître l’étendue de son rôle auprès de ces deux garçons et les clés de son succès.
Après le Mans, nous avons appris que tu allais collaborer avec Louis Rossi. En quoi consiste cette collaboration?
Mon rôle est le même qu’avec Johann, j’essaye de bien l’encadrer en le faisant rouler à la maison, à Avignon, sur une piste de Kart. Je les laisse rouler ensemble et j’essaye de réaliser le même travail de conseil que celui que j’effectue pour Johann.
Je reste en bord de piste et je repère ce qui fonctionne bien et ce qui doit être amélioré. Je décortique son style, sa vitesse de passage, son attitude sur la moto…
Le plus gros travail avec Louis consiste à lui apprendre à freiner du frein arrière car c’est capital pour stabiliser la moto et jusqu’à présent, il ne le faisait pas du tout.
Le but c’est de lui permettre d’exploiter ses capacités pour qu’il s’améliore et que la saison prochaine, ce ne soit plus nécessaire d’amener un gros budget pour décrocher une place sur la grille. Cette saison, il a dû délaisser son boulot de pilote pour chercher des sponsors et réunir des fonds alors nous, ce qu’on veut, c’est éviter que ça se reproduise.
Ne risque-t-il pas d’y avoir, à un moment ou l’autre un conflit d’intérêt ?
Absolument pas car la décision de travailler avec lui, nous l’avons prise avec Johann. D’ailleurs, sur son casque, il porte un autocollant ZF, qui est la société que nous avons montée ensemble avec Johann. On lui offre tous ces services avec un grand plaisir et en complète gratuité parce que c’est vraiment un bon gars et cet autocollant, c’est une façon visible de nous remercier.
Dans un premier temps, nous pensions que le travail de Laurent Fellon consistait simplement en un rôle de conseil mais visiblement ce rôle est plus large et se rapproche plus de celui de manager que de simple conseiller.
Tout à fait, on ne peut pas effectuer un travail à moitié ! Si on veut des résultats, on est obligé de parler à la personne et prendre le temps de lui expliquer ce qu’elle doit améliorer, exactement ce que je fais avec Johann. Si on prend la décision d’aider quelqu’un, on l’aide à fond sinon on ne l’aide pas, c’est aussi simple que ça.
Nous avons pris la décision de lui venir en aide parce que je pense qu’il est fait dans le même moule que Johann. Il est gentil, travailleur, il écoute et il est appliqué. Par contre, il y a un retard à combler parce que le travail de fond commence plus tard qu’avec Zarco.
Et au niveau de l’ambiance entre ces deux pilotes ?
L’ambiance, elle est excellente ! Nous avons constitué une société dont nous sommes actionnaires pour 50/50 avec Johann alors, la décision d’aider Louis, nous l’avons prise ensemble. Nous sommes deux, derrière lui, pour lui donner un coup de main. Par exemple lorsqu’ils roulent tout les deux, Johann passe devant et lui montre comment sortir le corps, quelle trajectoire choisir…et moi, du bord de piste, je me lance dans une étude comparative pour l'aider à progresser.
Parlons un peu de Johann Zarco, comment analysez-vous son début de saison ?
Il est très bien son début de saison et il est sur les bases de ce qu’on avait programmé. Depuis le 3 janvier, nous nous sommes entraînés avec, je tiens à le préciser, l’aide Yamaha Motor France, qui nous a prêté des R6. La saison dernière, il a raté le championnat du monde 125 de très peu alors, il fallait pouvoir tourner la page et se remettre en question.
Il a travaillé, il m’a écouté mais ça n’a pas toujours été simple. Au début ça n’allait pas fort et il me disait que ça n’irait jamais mais il a surmonté. Nous sommes une équipe, deux copains et je lui ai demandé de me faire confiance parce que je savais qu’on allait grandir ensemble et y arriver. Alors, après toutes ces épreuves, je peux dire que ça ne se passe pas trop mal.
Johann Zarco a donc bien progressé mais où doit-il encore s’améliorer ?
Il grandit et en conséquence, on a travaillé avec des Yamaha R6 (4000km) pour plusieurs choses. On a travaillé sur la position de conduite, on a appris comment freiner avec ces motos, comment la redresser, on a aussi appris à trouver le bon angle, qui n’est pas le même qu’avec une 125, à trouver la bonne vitesse de passage…
Toutes ces techniques doivent devenir des automatismes, mais pour ça, il faut pouvoir tout remettre en question, tout réapprendre et parfois, ça a été dur !
Quels sont les objectifs que vous fixez à vos pilotes ?
Ce serait magnifique que Louis réussisse à se placer dans les trois premiers au championnat du monde et qu’en fin de saison, on vienne le trouver, comme on est venu pour nous, en lui demandant ce qu’il compte faire la saison prochaine.
Quant à Johann, j’aimerais vraiment gagner un Grand Prix à la régulière et terminer dans le top 5 ou le top 6 du championnat du monde Moto2.
Après avoir discuté avec Laurent Fellon, une seule pensée nous traverse l’esprit et c’est celle de nous dire que Johann Zarco et Louis Rossi sont vraiment entre de bonnes mains.