Les organisateurs du motogp commencent à ouvrir les yeux
Que le MotoGP va mal n’est un secret pour personne. Avec le retrait de Suzuki du MotoGP, la grille de départ de la catégorie reine ne comportera que 12 motos ‘factory’ la saison prochaine.
C’est évidemment maigre pour une catégorie qui se veut être la référence en matière de courses de motos sur circuit.
La crise ne date pas d’hier, puisque depuis quelques années, les pilotes titulaires n’ont plus dépassé le nombre symbolique de 20.
C’est évidemment une situation qui ne plaît guère à Carmelo Ezpeleta, le CEO de la Dorna, qui s’est confié à nos confrères de Motosprint dans un entretien sans concession.
« Je n’aime pas la façon dont vont les choses. Je n’aime pas la période que traverse le MotoGP. Nous avons une série où les Honda vont très vite, d’autres un peu moins, et d’autres encore pire. De cette façon, il y a peu de bagarres, de sorte que le spectacle est insuffisant ».
Et le patron de la Dorna pointe comme principal responsable, le défi technologique que se lancent chaque année les constructeurs. « Le MotoGP n’est pas seulement un défi technologique, c’est aussi un sport et un divertissement. Je n’aime pas cette situation, donc les choses ne vont pas continuer sur cette voie beaucoup plus longtemps ».
Afin de remédier à cette situation, la Dorna a innové en admettant à la compétition ce qu’on appelle désormais des CRT. Ces motos, équipées de moteurs pouvant provenir de la série mais intégrés sur des châssis prototypes, seront moins performantes que les actuelles MotoGP mais devraient engloutir moins d’argent.
« Il est clair maintenant que la façon dont les motos sont construites ne fonctionne plus, elle n’est plus adaptée à la situation économique mondiale. Si nous continuons sur cette voie, avec les équipes qui manquent de budget pour louer des motos, en 2013, nous n’aurons plus que deux Honda sur la grille! Ce sport n’est pas censé aller de cette façon. »
Et le coup de pouce à la CRT sera comme toujours financier. Non seulement en venant en aide aux teams qui décident d’aligner une CRT mais également en liant les cordons de la bourse à ceux qui continueront à louer des motos d’usine (lire Tech3, LCR, Pramac, CardionAB). « J’ai décidé que je n’aiderais plus, d’un point de vue financier, les équipes qui, dans le futur, loueront des MotoGP. La Dorna aidera seulement les équipes qui utiliseront des CRT. Si nous arrivons à la situation où les trois constructeurs alignent six motos au total, nous continuerons à soutenir et à aider financièrement uniquement les équipes CRT. De cette façon, nous réussirons à avoir les 16 autres motos dont nous avons besoin ».
Et bien entendu, c’est le Moto2 que Carmelo Ezpeleta prend en exemple et on ne peut pas vraiment lui donner tort puisque c’est une série qui passionne les fans depuis maintenant deux ans. « Il est paradoxal que le Moto2, qui a été une série très critiquée, est celle qui offre le meilleur spectacle pour le moment, malgré le fait qu’en théorie, les pilotes sont d’un niveau beaucoup plus bas par rapport à ceux du MotoGP. Nous avons atteint un point où certains pilotes MotoGP ne peuvent plus rien faire parce qu’ils n’ont pas de moyens techniques adéquats, parce que pour courir, vous avez besoin de cinq millions …
Nous avons atteint un point où les équipes privées ne peuvent plus louer de MotoGP: le cas Aspar, comme beaucoup d’autres aussi, en est l’exemple parfait ! »
Cette situation aboutit finalement à une situation où ce ne sont plus les pilotes les plus talentueux qui peuvent décrocher un guidon mais les plus fortunés (même si dans certains cas les plus talentueux, comme Marc Marquez, sont aussi bien entourés)
« Il est ridicule qu’un pilote comme Stefan Bradl, le champion du monde Moto2, doivent payer quatre ou cinq millions pour s’aligner en MotoGP. Comment diable est-ce possible que vous ayez besoin d’une telle somme? Comment pouvons-nous continuer avec les fabricants demandant quatre millions pour la location d’une moto ? Moto, qui plus est, ne peut pas devenir propriété de l’équipe. C’est assez, cette histoire doit se terminer et vite. Cette époque est révolue ! »
Et Carmelo Ezpeleta, qui tient un discours dur vis-à-vis des constructeurs, se veut inflexible sur le sujet. « Les constructeurs peuvent dire et agir comme ils le veulent, mais ils ne peuvent pas changer la réalité. Ceci est la réalité: il n’y a plus d’argent, nous devons dépenser moins. Nous ne pouvons pas continuer à rester sans rien faire, nous devons agir maintenant ! ».
Voilà donc un discours ferme et musclé du CEO de la Dorna et nous, MotoSpeedRace, nous aimerons ajouter un petit billet d’humeur à cette interview.
La presse et certains journalistes qui en ont fait leur spécialité, sont souvent très critiques vis-à-vis de la Dorna. Toujours prompts à dénigrer, à épingler le moindre manquement…et bien nous, ça nous embête.
Non pas que nous soyons toujours d’accord avec la fédération, loin de là, mais cette critique systématique de ses initiatives devient lassante.
Certes, nous aimerions tous que tous les constructeurs moto s’impliquent dans le MotoGP et alignent deux motos ‘factory’ et deux ‘satellites’, parce que pour nous, le sport Moto, ce n’est pas seulement un pilote, ce sont aussi les ingénieurs que nous ne voyons jamais mais qui usent leurs neurones pour améliorer les machines.
Certes encore, cette année Honda a produit une véritable machine de guerre sur laquelle ont travaillé des dizaines de techniciens venus de la F1 et c’est évident que tous ces hommes ont une part dans le succès éclatant de la RC212V frappée du numéro27.
Mais comme le dit, de façon musclée, Carmelo Ezpeleta, cette époque est révolue ou tout au mieux entre parenthèses, alors il faut accepter de passer à autre chose car le dimanche, quand ces journalistes regardent la course en salle de presse, que préfèrent-ils ? Une course disputée ou une course de bécane à 4 millions d’euros où la première bagarre concerne le gain de la sixième place ?